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RFC 6852: Affirmation of the Modern Paradigm for Standards

Date de publication du RFC : Janvier 2013
Auteur(s) du RFC : R. Housley (IETF Chair), S. Mills (IEEE-SA President), J. Jaffe (W3C CEO), B. Aboba (IAB Chair), L. St.Amour (ISOC President and CEO)
Pour information
Première rédaction de cet article le 26 janvier 2013


Au cours des préparatifs de la réunion WCIT, organisée par l'UIT à Dubaï en décembre 2012, une des propositions faites au sein de la bureaucratie UIT était de rendre obligatoires, d'une manière ou d'une autre, les normes techniques émises par l'UIT. Ce projet n'a finalement apparemment pas été adopté mais il avait déclenché une réaction des autres SDO, qui ne voyaient pas pourquoi l'UIT aurait un tel privilège. Trois de ces SDO, l'IEEE, l'IETF et le W3C ont signé en commun une déclaration, dite OpenStand, dont ce RFC reprend le texte.

On comprend l'UIT : ses normes techniques (comme X.25 ou X.400) sont aujourd'hui bien oubliées et, dans l'Internet d'aujourd'hui, il ne reste guère de normes UIT qui soient utilisées (X.509 et ASN.1 doivent être parmi les rares exceptions, et encore, X.509 est menacé par le RFC 6698). Obtenir par un traité international, puis par la loi, ce que les acteurs du réseau lui ont refusé est donc tentant. L'un des principaux points de la déclaration tripartite des autres SDO est donc que l'adoption des normes doit rester fondée sur le volontariat : on déploie sur le réseau réel les normes qui ont un sens, et pas n'importe quel délire issu des comités Théodule de l'UIT, déconnectés de la réalité depuis longtemps.

La déclaration tripartite OpenStand a été signée le 29 août 2012, sans discussion à l'intérieur de l'IETF, dont les membres ont découvert le texte a posteriori. Comme la déclaration était le résultat d'un accord multilatéral, il ne pouvait plus être modifié par la suite. Le RFC reprend son texte littéralement, et tout le processus normal de discussion d'un RFC a donc été court-circuité : il y a bien eu des appels à commentaires mais les commentaires ont été complètement ignorés.

D'autres organisations ont signé depuis cette déclaration, on peut en trouver la liste sur le site officiel d'OpenStand.

Que dit cette déclaration (section 2) ? Après un préambule où n'est mentionné que le business (comme si l'Internet ne servait pas à une myriade d'autres activités, comme le notait le commentaire #193), les global markets et la concurrence, la déclaration affirme cinq points. Le premier est une sorte de clause de « non-ingérence dans les affaires des autres SDO », où chaque signataire s'engage à respecter les règles des autres. Le deuxième est l'adhésion à cinq principes :

  • Un processus de développement des normes qui repose sur des processus clairs et documentés, sans arbitraire,
  • La recherche d'un accord aussi large que possible, prenant en compte l'intérêt de tous,
  • La visibilité publique des travaux en cours, avec par exemple des appels à commentaires qui soient publics (on notera que le développement de la déclaration OpenStand n'a pas suivi cet excellent principe),
  • Un équilibre entre les parties prenantes, de manière à éviter le poids excessif d'un groupe précis (l'UIT est dominée par les États, alliés aux opérateurs telco traditionnels, mais les autres SDO ont en commun qu'elles sont réservées aux professionnels, le simple utilisateur n'est pas représenté),
  • Une ouverture à tous les volontaires qui veulent participer.

Le troisième point de la déclaration est un pot-pourri de points souhaitables dans les normes techniques produites (par exemple qu'elles permettent l'interopérabilité, la résilience, le passage à l'échelle, etc).

Le quatrième est le plus hypocrite : la disponibilité des normes techniques. Or, si des dinosaures comme l'ISO ou l'AFNOR ne publient toujours pas leurs normes sur l'Internet, si des organisations comme l'ETSI imposent des restrictions ridicules (enregistrement préalable, limite à trois normes accessibles), l'UIT, après de très longues hésitations, a fini par passer au vingt-et-unième siècle et ses normes sont désormais gratuitement accessibles. Par contre, un des signataires d'OpenStand, l'IEEE, ne le fait toujours pas... Il avait été question de mettre dans la déclaration tripartite une phrase comme « The text of standards is made accessible to all, free of charge or at low cost », voire, plus flou, un mot sur l'importance d'une distribution free des normes (avec la délicieuse ambiguité de l'anglais sur le mot free) mais cela a été écarté, sinon l'IEEE ne signait pas. C'est sur ce point que le caractère politicien d'OpenStand est le plus clair.

Le même point mentionne la délicate question de l'appropriation intellectuelle, qui affecte tant de normes. Les différences de politique entre les trois signataires (et même à l'intérieur de chaque signataire, notamment l'IETF), font que la déclaration reste très vague, acceptant aussi bien les techniques complètement libres que celles plombées par un brevet, à la seule condition, très générale, que les licences soient FRAND.

Enfin, le cinquième point de la déclaration est l'importance d'une adoption volontaire des normes, fondée sur leur mérite technique et pas sur une décision autoritaire, comme indiqué au début de cet article.


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